Peu de réalisateurs me fascinent autant que Quentin Tarantino et David Fincher. Pourtant, si la filmographie du premier est un quasi sans-faute (le cas de Boulevard de la Mort reste à prouver), on ne peut pas en dire autant concernant le second. Metteur en scène de chefs d’oeuvre tels que Seven, Fight Club ou encore The Game, monsieur Fincher a également donné naissance aux moins bons Zodiac, The Social Network, ou encore… Gone Girl.
Tout commence avec un générique d’introduction d’une froideur sans nom. Les noms des acteurs apparaissent et disparaissent à la vitesse de l’éclair (drôle de choix mais passons), tandis que des images défilent. Celles-ci ont pour but de nous dresser le décor : une banlieue plutôt bourgeoise du Missouri, façon Wisteria Lane dans Desperate Housewives. En fond, la voix-off de Ben Affleck, alias Nick Dunne, nous expliquant qu’il aime sa femme mais qu’il ne la comprend pas (ou plus). 2 heures et 29 minutes plus tard, nous ne sommes pas plus avancés. C’est en effet la frustration incommensurable que vous risquez, tout comme moi, de ressentir en sortant de la salle si vous aussi, vous vous attendiez à du grand Fincher.
Oui car ne nous voilons pas la face, les médias nous vendent ce film comme, je cite, un thriller plein de rebondissements. Honnêtement, on ne doit pas avoir la même définition du mot rebondissement. Deux grosses (et encore) révélations sont en effet au programme dans Gone Girl. Problème : elles arrivent toutes les deux avant la fin de la première heure. Autant vous dire que les 90 minutes restantes vont vous sembler durer une éternité. Et ce n’est d’ailleurs pas la petite scène d’action, déboulant comme si de rien était vers la fin du film, qui risque de vous faire sauter de votre siège, loin de là.
Malheureusement, vous vous en doutez, mon but étant de ne jamais vous spoiler quoique ce soit, cet article a toutes les chances d’être assez court. Plus court en tout cas que le visionnage de ce film à la fin complètement loupée et au jeu d’acteurs parfois douteux. Je fais ici allusion à Rosamund Pike en priorité. Je l’avais trouvé assez insupportable dans Clones, puis dans Le Dernier Pub avant la fin du Monde, c’est encore une fois le cas dans Gone Girl. Ses mimiques ainsi que ses intonations semblent sonner faux tout au long du film.
Pour l’anecdote, sachez que Reese Witherspoon (actrice reconnue mais également productrice de Gone Girl) a failli jouer le rôle de l’épouse. Pire encore, Natalie Portman, Charlize Theron ou encore Emily Blunt ont carrément refusé le rôle, au profit de Rosamund Pike. Pauvre de moi. L’actrice britannique interprète donc le rôle d’Amy Dunne, la femme de Nick. Autant dire que cette dernière est au centre du long-métrage. Et puisque je ne vous ai pas encore parlé de l’intrigue, analysons ensemble le synopsis du film.
Nick Dunne et sa femme Amy sont mariés depuis maintenant 5 ans. Le 5 juillet de cette année-là, pour fêter leur anniversaire de mariage, Amy dissémine des enveloppes un peu partout (d’abord dans la maison conjugale, puis à l’extérieur) afin de faire participer Nick à ce qu’elle appelle une chasse aux trésors. Manque de bol, ce petit jeu de pistes tourne au drame lorsqu’Amy disparaît, et ce, avant même que Nick ait eu le temps d’ouvrir la première enveloppe. Non parce que vous comprenez, Nick est un homme moderne. Alors à 7 heures du matin il est déjà parti de la maison pour s’acheter un café. A 9 heures 30 il se paye même le luxe d’aller bouquiner sur la plage… Tandis qu’à 11 heures, il boit du bourbon au Bar (c’est son nom) appartenant à sa soeur Margo (interprétée par Carrie Coon). Il est à noter, au passage, que Carrie Coon (aucun lien de parenté avec Eric Cartman, selon mes sources) est sans aucun doute possible l’actrice la plus juste de ce Gone Girl. Je la découvre avec ce film et autant dire qu’elle n’a pas de quoi rougir face aux têtes d’affiches présentes dans ce long-métrage.
Mais revenons-en à nos moutons. Je vous le disais, Amy disparaît le jour fatidique. Seule certitude : la cuisine du couple est tâchée de sang. S’est-elle suicidée ? A-t-elle été kidnappée ? A-t-elle fui pour prendre des cours d’art dramatique avant de revenir sur le tournage du film ? Soyez rassurés, vous trouverez les réponses à toutes ces questions dans Gone Girl. Malgré cela, et c’est assez rare dans un Fincher, le film ne parvient jamais à nous surprendre, ni même à nous tenir en haleine.
Le film est en effet long, lent, et extrêmement mou. On pourrait dès le début s’attacher au mari ou à la femme en espérant que l’intrigue va générer dans nos têtes des tonnes de scénarios possibles. On pourrait également se dire que le film a été pensé de cette façon, afin de nous « endormir » pour mieux nous réveiller via un cliffangher final des plus haletants. Eh bien non. Il n’en est rien.
Pour être honnête, on va même jusqu’à penser que les seconds rôles ont été bâclés. L’ancien petit-ami Desi Collings (interprété par Neil Patrick Harris, le Barney Stinson de How I Met Your Mother), l’avocat Tanner Bolt (joué par Tyler Perry), mais aussi et surtout l’étudiante Andie (la sublime Emily Ratajkowski aperçue dans le clip Blurred Lines de Robin Thicke)… Tous n’apparaissent que quelques minutes à l’écran. Frustrant quand on sait qu’ils auraient sans doute pu apporter leur lot de mystères, voire même de piments, à cette intrigue mollassonne.
Gone Girl c’est surtout ça. Un film qui n’atteint jamais le stade que l’on espérait. Tantôt soporifique, tantôt faussement distrayant (car on se prend parfois à rêver d’un quelconque rebondissement incroyable… en vain), le dernier bébé de David Fincher ne vaut que pour son synopsis de base ainsi que sa photographie. L’ensemble visuel, glacial, est en effet tellement adapté au scénario qu’on se demande comment il aurait pu en être autrement. Pour l’anecdote, sachez que le réalisateur a tourné son film en 6K (soit 9 fois le 1080p du Full HD). Sachant que quasiment personne n’a le matériel nécessaire pour lire du 4K, pourquoi ne pas enfoncer encore un peu plus le clou, n’est-ce pas ?… Et puis après tout, c’était peut-être une entreprise nécessaire afin de donner vie à un roman. Oh mais… Avais-je oublié de le préciser ? Suis-je bête, évidemment que Gone Girl est l’adaptation d’un roman. Vous en aviez douté ? Eh oui, maintenant, même Fincher a besoin de ça pour faire des films.
Ce dernier est en effet l’adaptation cinématographique du roman Apparences, de l’américaine Gillian Flynn. Celle-ci a d’ailleurs avoué que, lorsqu’elle écrivait son livre, elle rêvait déjà de voir son projet porté à l’écran par David Fincher. A noter en revanche, et c’est assez rare pour être souligné, que le scénario de Gone Girl a lui aussi été écrit par Gillian Flynn. Entendez par là que le film ne se déroule donc pas tout à fait de la même manière que l’intrigue papier. Pire que tout, et c’est peut-être la pire décision qu’elle ait prise finalement, l’auteure du best-seller a tout simplement décidé de changer la fin de l’histoire.
Oui, vous avez bien lu. Pour ne pas faire de redite, madame a cru bon de modifier les dernières minutes de Gone Girl pour que cela ne coïncide pas avec la fin de son roman… Soyons clair, au vu du ratage total dont fait preuve le dénouement du long-métrage, je pense donc qu’il ne me reste plus qu’à lire Apparences afin d’y trouver, je l’espère, une fin plus attrayante.
Pour finir sur une note un peu plus positive, sachez que la bande-originale du film est bonne, puisque quasiment inexistante. Cela peut sembler moqueur, mais je vous assure que non. J’ai tendance, tout comme dans les jeux vidéo, à être plus facilement immergé dans une ambiance, quelle qu’elle soit, lorsque la musique de fond sait se faire discrète, voire inaudible. C’est donc ici un bon point à donner à ce Gone Girl. Est-ce pour autant le seul ? Bien sûr que non. Je vous le disais, le synopsis de départ est clairement intriguant (à défaut d’être original) et le jeu d’acteur de Ben Affleck est ici loin d’être mauvais (bien que le monsieur ait pris trop de stéroïdes. La sortie de Batman approche mais esthétiquement ça la fout mal). Sella Ward y fait également une apparition réussie, bien que très courte.
Malheureusement, le tout est tellement couru d’avance (même pour moi qui n’ai pas lu le livre avant, c’est dire !) qu’on a bien du mal à tenir éveillé durant les 2 heures et 29 minutes que dure ce Gone Girl. Pire que tout, lorsque le générique de fin apparaît à l’écran, on en vient à se poser cette question devenue tellement banale dans le Cinéma ces dernières années : « Tout ça pour ça ? ». Ou comme dirait Kevin Spacey dans la version française de Seven : « C’est supposé être drôle ? ». Eh non ! Bien tenté Fincher, mais ça ne prend plus. Pas avec nous, tes fans, en tous les cas.