Il fut un temps où les réalisateurs en tous genres ne se basaient que sur leur propre imagination pour donner vie à leurs films. Ce n’est plus vraiment le cas, car force est de constater que 80% des productions actuelles ne sont en réalité « que » des adaptations cinématographiques d’oeuvres papier. Le Grimoire d’Arkandias en est un exemple supplémentaire.
Cela dit, cette fois c’est différent. Eric Boisset, auteur des romans qui nous intéressent aujourd’hui, a été clair avec l’équipe du film : elle a eu carte blanche quant à cette adaptation. Et si je parle de plusieurs romans, c’est tout simplement que nous avons à faire ici à une trilogie. Je peux même vous annoncer que si Le Grimoire d’Arkandias fait suffisamment recette, les deux prochains films à voir le jour se nommeront Arkandias Contre-Attaque, puis Le Sarcophage d’Outretemps. Tout un programme.
Il est à noter que les oeuvres papier en question datent de 2001. L’écriture du scénario du film, lui, n’a commencé qu’en 2012. Et puisque je ne vous ai pas encore parlé du réalisateur, sachez que vous connaissez peut-être déjà ce monsieur. Alexandre Castagnetti, puisque c’est son nom, est en effet le clavier barbu du duo comique La Chanson du Dimanche. Autant dire que vous l’avez sûrement croisé à un moment ou à un autre sur les internets. Vous ne serez donc pas surpris si je vous dis que la bande-son du film a été réalisée par Clément Marchand, l’autre moitié du duo musical. Disons simplement qu’ainsi la boucle est bouclée.
A noter que Castagnetti avait déjà oeuvré par le passé en tant que metteur en scène. En 2003 tout d’abord, via L’incruste, fallait pas le laisser entrer ! (avec Titoff et Frédéric Diefenthal). Puis en 2013 notamment, via Amour & Turbulences (avec Nicolas Bedos et Ludivine Sagnier). Autant dire que le film dont je vous fais la critique aujourd’hui est radicalement différent des ambiances précédentes. D’autant que faire jouer 3 enfants dans les rôles principaux est un challenge de taille.
Oui car vous l’aurez sans doute deviné, Le Grimoire d’Arkandias reste un film (et un livre) assez enfantin. Pourtant, à l’instar d’Harry Potter, j’ai le sentiment qu’il saura réunir toute la famille, sans forcément paraître niais ou inintéressant. Et pourtant, le synopsis n’est vraiment pas là pour aider. Dans un petit village breton, Théo (Ryan Brodie) vit en effet seul avec sa mère et son grand frère un peu abruti. Son père est décédé quelques années auparavant, noyé. Ce qui a tout naturellement donné à notre héros la phobie de l’eau. Le meilleur ami de Théo s’appelle Bonav (Timothée Coetsier), un gamin pas franchement aidé par la nature et amoureux de Laura (Pauline Brisy). Cette dernière vit en foyer et n’est pas très sociable. Malgré le fait qu’elle soit dans la même classe que les deux garçons (ce qui est juste inconcevable étant donné que l’actrice en question est bien plus âgée), on ne peut pas dire qu’elle les considère comme ses amis. Elle le dit elle-même : ce sont des boloss (des losers, ou ratés, si vous préférez).
Tout va bien dans le meilleur des mondes ou presque, jusqu’au jour où Théo s’amuse à accomplir un rituel lu dans un grimoire magique. Ce dernier aboutira en effet à la création d’une bague d’invisibilité. L’objet attirera à la fois le gentil sorcier de l’histoire (Arkandias, joué par Christian Clavier), mais également les trois soeurs Boucher, interprétées par Anémone, Isabelle Nanty et Armelle. Autant dire qu’on est loin des bombasses qu’étaient les soeurs Halliwell de Charmed.
L’originalité n’est donc pas spécialement le point fort du film. Pourtant, j’ai réellement passé un super moment devant ce long-métrage. Croyez-moi, ce n’était pour autant pas gagné d’avance. En effet, en dehors du fait que je ne porte pas particulièrement Christian Clavier dans mon coeur, j’ai également beaucoup de mal à supporter les films joués par des enfants, à plus forte raison dans des films français. Tous les ingrédients étaient donc réunis pour me faire vivre un cauchemar version salle obscure.
Étrangement, c’est tout l’inverse qui s’est produit. En effet, que ce soit les effets spéciaux que j’ai trouvé tout simplement bluffants de réalisme (là où les productions françaises nous font habituellement sourire), ou encore le jeu d’acteur de l’ensemble du casting, le film fut une réelle bonne surprise me concernant. Et c’était sans compter sur les deux plus gros points forts de ce long-métrage, à savoir son ambiance et son humour.
Dans le premier cas, sachez que ma peur de me retrouver face à un « Harry Potter à la française » s’est totalement estompée passées les 10 premières minutes. L’équipe technique a réussi à donner un véritable cachet au film, c’est une évidence. De par ses décors tout d’abord, belges pour la plupart. De par sa photographie et ses scènes de nuit, aussi, visuellement très agréables. Mais également grâce à la performance de Christian Clavier (et de son petit capucin), assez irrésistible en Arkandias, il faut bien le dire. Et même si le cliché paraît lointain, force est de constater que son rôle nous fait ici irrémédiablement penser à celui de Jacquouille dans Les Visiteurs (1993).
Pour ce qui est de l’humour du film, enfin, sachez qu’honnêtement j’étais plutôt sceptique. Le moins que l’on puisse dire, c’est que j’ai été, au final, très agréablement surpris. Grâce à Christian Clavier là encore, mais pas seulement. Armelle joue en effet très bien son rôle de soeur potiche (et/ou potache, c’est au choix), mais rendons à César ce qui lui appartient. Les passages qui m’ont rendu hilares sont en effet ceux qui entretiennent le running gag entre Bonav et la jolie Laura. Le jeune garçon aux cheveux longs (qui vous fera sans doute penser au jeune acteur belge Jérémy Denisty) cherchant tout au long du film à se faire aimer, ou tout du moins apprécier, par la jeune femme. Mention spéciale, d’ailleurs, pour la scène de la douche. Vous comprendrez après avoir vu le film.
Côté points noirs, Le Grimoire d’Arkandias s’en sort plutôt pas mal, avec un ratio qualités/défauts penchant nettement vers le positif. Seule ombre au tableau selon moi : le manque d’approfondissement (et en particulier parce que le film passe très vite), notamment en ce qui concerne le personnage d’Arkandias. Eh oui, car en lisant le titre du film, ou encore en visionnant la bande-annonce de ce dernier, on s’imagine (à juste titre) que le long-métrage tournera autour du mage aux cheveux longs. Que nenni ! C’est fort dommage car il y avait là, selon moi, matière à décortiquer. Espérons donc que ce défaut sera corrigé dans la suite de ses aventures, si suite il y a, bien entendu.
Vous l’aurez compris, si Le Grimoire d’Arkandias (visible en salles dès le mercredi 22 octobre 2014) n’est pas le film du siècle, ni même de l’année, il y a fort à parier que celui-ci vous enchantera à sa façon. Bénéficiant d’un casting haut en couleurs et d’une ambiance fantastique saupoudrée d’humour, le dernier film d’Alexandre Castagnetti fait honneur à son homologue papier. Gageons qu’Eric Boisset, auteur de la trilogie originelle, en sera donc satisfait, et qu’il en sera de même pour le public français. Après tout, ce serait quand même dommage de se priver des deux autres opus tant le pilote est prometteur.
Il est marrant ce film. 😄
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