Lorsqu’on parle des films d’animation qui nous ont le plus marqué ces dernières années, on pense tout naturellement à des productions nord-américaines, ou encore à des « dessins animés » japonais transposés sur grand écran. C’est indéniable, les projets européens n’ont jamais eu la cote dans ce domaine. Pourtant, on tombe parfois sur d’agréables surprises. Des pépites, même. Le Chant de la Mer, visible dans les salles françaises dès le mercredi 10 décembre, en fait partie.
Coproduit par l’Irlande, la France, le Danemark, le Luxembourg et la Belgique, le tout nouveau film du réalisateur Tomm Moore a en effet de quoi séduire. Après un Brendan et le secret de Kells salué par la critique en 2009, le metteur en scène irlandais nous revient donc avec un deuxième bébé, toujours aussi empreint de culture celtique. Le Chant de la Mer nous propose en effet de suivre les aventures de Ben et de sa petite soeur Maïna. Les deux bambins vivent dans un phare avec leur père Conor et leur chien Joe. La grand-mère est également de la partie et veut à tout prix convaincre la petite famille de venir vivre en ville, au coeur de la « vraie » civilisation. On imagine qu’elle fait ça pour le bien de Ben et de la petite Maïna. Cette dernière est en effet muette et fragile, mais saura se tirer de situations dangereuses grâce aux « liens » qu’elle tisse avec le « monde magique ».
Et là vous vous dites : « Comment ça le monde magique ? ». Oui car pour ceux qui n’auraient pas suivi, Le Chant de la Mer entend bien vous faire connaître quelques unes des légendes folkloriques issues du patrimoine irlandais. Nous basculerons donc souvent entre magie et réalité tout au long du film. Pour tout vous dire, on pourra trouver ça déroutant au début. Des femmes qui se transforment en phoque (des selkies, pour être précis), des géants de pierre qui pleurent, des sorcières prenant la forme de hiboux… Forcément, on pense d’abord que le réalisateur a du prendre un sacré paquet de pilules avant de s’atteler à la réalisation de son projet. Puis on s’y fait, on se prend même au jeu finalement. La faute aussi (et surtout) aux influences utilisées ici. Oui car si comme moi vous êtes un féru de films similaires, vous ne pourrez pas rester indifférent devant ce qui semble être un hommage à d’autres grands classiques. Force est de constater que Le Voyage de Chihiro et Mon Voisin Totoro ne sont pas loin. Coraline non plus d’ailleurs.
Alors, certes, les influences susnommées sont avant tout visuelles. Mais pas seulement. Non, car on les ressent aussi bien de par les thèmes qu’aborde Le Chant de la Mer. Et je vous prie de bien lire ce qui va suivre, car c’est sans doute ce qui fera pencher la balance d’un côté ou de l’autre quant à savoir si vous emmènerez vos enfants en salles ou non. Car ce long-métrage, comme tant d’autres, ne correspond pas à l’idée qu’on se fait d’un « dessin animé pour enfant ». Je ne dis pas qu’il leur est interdit. Je dis simplement qu’on y aborde sans trop de retenue la mort (et plus précisément le deuil d’un être cher), ou encore le déménagement forcé (souvent très mal vécu durant l’enfance). L’intrigue amène ça avec brio, mais je n’ai absolument pas été surpris d’entendre quelques enfants pleurer dans la salle lors de la projection à laquelle j’ai assisté. Vous voilà prévenus.
Si je devais retenir un point positif plus important que les autres concernant ce film, ce serait sans aucun doute son ambiance. J’ai été émerveillé à plusieurs reprises devant certains paysages, certaines scènes aux effets de lumière tout simplement somptueux. Cela contraste d’ailleurs assez fortement avec le reste des « dessins » (des visages, notamment), nettement plus sommaires. La bande-son, quant à elle, mérite tous les superlatifs. C’est d’ailleurs selon moi l’un des points névralgiques de ce projet tant le chant y est primordial (vous comprendrez quand vous ferez face à l’écran). Le réalisateur Tomm Moore a donc décidé pour cela de faire appel une nouvelle fois (après Brendan et le secret de Kells) à Bruno Coulais et Kila, du groupe Colm Ò Snodaigh.
Du très bon boulot en perspective même si, je l’avoue, tout n’est pas spécialement à mon goût. La chanson de la selkie, entre autres, se montre assez exaspérante au bout de sa 50ème apparition dans le film. Notez que cet avis n’engage bien évidemment que ma personne. Le thème principal, lui, est chanté par la plus celte des chanteuses françaises, j’ai nommé Nolwenn Leroy.
Le Chant de la Mer aurait donc pu être un incontournable à mes yeux. Ce n’est pourtant pas le cas. Non pas que le film soit mauvais, bien au contraire, vous l’aurez compris. Mais j’ai cependant noté un défaut de taille dans cette production. En effet, si les 30 premières minutes sont intrigantes (on aimerait comprendre ce qui se passe plus précisément), et si la deuxième partie du film (jusqu’à la fin) est tout bonnement géniale (du suspense, de l’action, une intrigue qui monte en puissance), il n’en reste pas moins que le « milieu » du long-métrage est sans aucun doute son ventre mou.
Autant être clair, je me suis ennuyé pendant une bonne partie du film. Au point de regarder ma montre à plusieurs reprises. Ce n’est pas pour autant que je dénigrerai cette production fortement originale (en plus d’aborder des thèmes et un folklore intéressants), mais soyons honnêtes, l’intrigue n’est clairement plus passionnante pour un sou dès la 30 ou 40ème minute. C’est d’autant plus étonnant (et dommage) que le tout s’emballe bel et bien un peu plus tard dans le film. « C’est pas passé loin », comme on dit.
Toujours est-il que Le Chant de la Mer fascine. Que ce soit par le biais de sa bande-son ou encore de son ambiance visuelle, je ne saurais que trop vous conseiller de tenter l’expérience. Et si l’écriture est un peu en dents de scie, il est vrai, ce serait tout de même dommage de passer à côté d’un si beau projet. On aurait aimé que certains personnages soient plus développés (la grand-mère, ou encore Ben), mais qu’à cela ne tienne, le nouveau bébé de Tomm Moore a de quoi intriguer, et ce, de bien belle manière.
Les légendes irlandaises nous auront rarement été contées de façon aussi accessible, et c’est tant mieux. Le parallèle entre les croyances et la réalité, entre la vie et la mort, ou tout simplement entre les protagonistes et leur penchant « magique » est réellement prenant. Dommage que le rythme et l’intérêt baissent subitement avant la deuxième partie du film. Heureusement, les musiques celtiques composées expressément pour le film, la voix de Patrick Béthune (doubleur officiel de Kiefer Sutherland, entre autres) dans le rôle du père, mais aussi le ton très Miyazaki de l’ensemble font de ce Chant de la Mer une oeuvre à voir… Et à entendre.
Les chants doit être super à entendre.
Ps : J’aime beaucoup les petit flocons qui tombe sur ton blog.
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Oui, la bande-son du film est vraiment bonne, surtout si tu aimes les chants celtes / bretons. J’aime beaucoup aussi ces petits flocons mais ils ne sont pas de moi 😉 C’est WordPress qui les fait tomber sur tous les blogs en hiver 🙂
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J’entends votre critique mais, à part le petit défaut de « coup de mou » que vous relatez dans la 1ère partie du film. Cela nous change quand même des Disney ou des productions japonaises un peu gnan gnan. J’ai emmené 32 enfants de 3 à 6 ans voir ce film aujourd’hui et je ne le regrette pas. Les légendes Celtes ainsi transposées sont rarement aussi bien mises en scène par des cinéastes européens. Les producteurs de Disney nous empruntent nos contes et légendes pour les mettre à l’écran comme dernièrement avec Rebelle, Réponse ou La Reine des Neiges…. Et j’avaoue que j’en ai un peu marre de donner mon argent aux américains. Le dernier régal Européen que j’avais vu avec un tel niveau était « Ernest et Céléstine ». Bon d’accord le scénario tiré des BD était déjà formidable. Bref, tout ça pour dire que le film m’a vraiment beaucoup ému et que les enfants semblaient avoir apprécié…
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Eh bien merci à vous pour ce commentaire et pour avoir pris le temps de lire ma critique. Ravi que le film vous ait plu, après tout c’est le plus important. Je me souviens également très bien d’Ernest & Célestine, mais ça ne me rajeunit pas… 😉
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Bonjour Monsieur Toc,
Je vous remercie de votre critique bien détaillée.
J’ai trouvé un élément précis que j’ai cherché dans les critiques sur allociné et que j’ai pu trouver dans la votre. Cette histoire n’est pas adaptée aux enfants. À quoi sert-il d’exposer la mort et le déménagement forcé aux enfants ?! Est-ce un dessin animé pour les enfants ?! Malheureusement malgré la nationalité de ce film nous pouvons constater la ressemblance avec des dessins animes américains ou la violence est souvent bien présente.
La personne qui a emmené 32 enfants voir ce film et qui pense que les enfants l’ont bien vécu se trompe. Mon enfant a pleuré la mort dans ce dessin. Des belles images ? Il a surtout retenu la mort et la tristesse de ce dessin animé. L’enfant de ma copine – c’est pareil, il a dit que c’était triste et qu’il a eu peur plusieurs fois… De plus, ce dessin animé est « à partir de 6 ans ». Alors emmener voir ce film les enfants de moins de 6 ans c’est encore pire !! C’est une règle de base de ne pas traverser au feu rouge et de s’assurer que le contenu est adapté aux enfants de moins de 6 ans.
En conclusion, ce sont des belles images qui sont vendus aux spectateurs (on peut de nouveau faire le parallèle avec nos voisins américains) et l’histoire du film n’est qu’un accompagnement sans d’importance.
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Bonjour Mila et merci d’avoir pris le temps de commenter ma critique. N’ayant pas d’enfant moi-même, je vous avoue ne pas savoir sur quel pied danser quant au visionnage de ce Chant de la Mer. Il est vrai que, comme je le disais dans le texte, dans la salle où je suis allé le voir, plusieurs bambins se sont mis à pleurer à la fin du film. Peut-être étaient-ils un peu jeunes, je ne saurais le confirmer. En revanche, comme vous le dites, le projet vaut surtout pour son ambiance (visuelle et sonore), mais ne bénéficie pas d’un scénario suffisamment palpitant pour être tenu en haleine.
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