Ce n’est un secret pour personne, les jeux sortant sur PlayStation 3 sont à présent aussi rares que des puits de pétrole en Auvergne. Pourtant, certains éditeurs courageux et un brin foufous tels Nippon Ichi continuent de faire l’effort, et en version boîte qui plus est. Dans 99% des cas, cependant, ce sont des jeux à forte ambiance japonisante que l’on pourrait qualifier sans soucis de « jeux de niche ». Le jeu dont je m’apprête à vous parler ne déroge pas à la règle. Koch Media France m’ayant fait l’honneur de m’envoyer ce titre, c’est avec plaisir que je vais le décortiquer pour vous.
En effet, si l’intitulé du soft testé entre ces lignes, à savoir The Awakened Fate Ultimatum, vous est totalement étranger, c’est au final un peu normal. Sorti le 20 mars de cette année (exclusivement sur PlayStation 3), le bougre est en réalité la suite de The Guided Fate Paradox (sorti fin 2013, là aussi exclusivement sur PlayStation 3). Ces deux jeux passent donc globalement assez inaperçus, comme quasiment tous les titres édités par NIS (Nippon Ichi Software), seul éditeur à tenter la commercialisation de ces softs étranges et pour le moins originaux.
Pourtant, si tout n’est pas forcément bon à prendre dans la tonne de jeux de niche qui peut voir le jour chaque année, force est de constater que The Awakened Fate Ultimatum vaut autant le détour que son grand frère. Agréable à l’oeil, plein de bonnes idées, contenu conséquent, prix raisonnable… Seul le fait qu’il soit (comme tous les autres) intégralement sous-titré en anglais (et doublé en japonais) pourra freiner les moins téméraires d’entre vous. Cependant, ce serait passer à côté d’une expérience tout à fait singulière, pour ne pas dire extrêmement prenante. Mais commençons par le commencement.
Dans The Guided Fate Paradox (le premier opus, donc), vous incarniez un jeune homme lambda qui devenait Dieu après avoir joué à la loterie au tout début du jeu. S’en suivaient des donjons inspirés des rogue-like (Rogue Legacy, Binding of Isaac, etc…), à enchaîner entre deux scénettes fortement inspirées de The Witch & The Hundred Knights et autres Disgaea (que des jeux NIS, en somme). Le jeu bénéficiait d’un énorme aspect RPG tactique et pouvait se montrer tantôt jouissif, tantôt extrêmement frustrant. En revanche, son scénario forçait le respect et nous poussait sans cesse à continuer (on pense notamment au 1er chapitre, dans lequel on doit aider Cendrillon à se sortir du conte pour enfants dans lequel elle évolue, et duquel elle aimerait se débarrasser définitivement). J’ai pour ma part passé de très nombreuses heures sur ce titre et, bien que n’ayant jamais eu le temps de le terminer, c’est un jeu que j’ai beaucoup apprécié.
The Awakened Fate Ultimatum, lui, est à la fois très semblable à son aîné, en étant en même temps tout son opposé. Je m’explique : dans ce deuxième opus (qui n’est d’ailleurs pas la suite réelle de The Guided Fate Paradox, vous pouvez donc parfaitement y jouer sans avoir fait le 1er), vous incarnez un jeune homme dénommé Chin qui, dès le début du jeu, je vous le donne en mille… VA DEVENIR DIEU LUI AUSSI ! A ce stade de l’aventure, difficile de trouver le synopsis original car, comme dans le premier opus, on va se retrouver à aider les Anges à se battre contre les Démons, et ainsi de suite. Pourtant, si les ressemblances ne s’arrêtent pas là, force est de constater que l’évolution d’un aspect du jeu pour le moins fondamental va littéralement nous sauter aux yeux dès les premières minutes : le style visuel. Loin du classicisme austère de son grand frère, The Awakened Fate Ultimatum propose, lui, un aspect dit chibi tout à fait exceptionnel. J’imagine sans mal que ce ne sera pas du goût de tout le monde (l’aspect comique, voire enfantin, prenant peut-être de fait un peu plus d’ampleur que dans le 1er), mais ne lui jetons pas la pierre pour autant. Personnellement je vois plutôt ça comme une bonne nouvelle. En effet, malgré ses qualités indéniables, le premier opus avait tendance à trop se rapprocher (du moins visuellement, soyons clair) de la série des Disgaea. Une excellente licence au demeurant, mais ne crachons pas sur un peu plus d’originalité, à plus forte raison lorsque cela concerne deux jeux du même éditeur.
Une fois la surprise visuelle passée donc (ou digérée, c’est selon), on notera que cette suite est au final bien plus accessible que son prédécesseur. Exit les combats à s’arracher les cheveux (enfin, la plupart du temps, en tous les cas), bonjour la joie de parcourir les donjons en switchant entre nos pouvoirs angéliques (pour défourailler du démon), et nos pouvoirs démoniaques (pour défourailler de l’ange). Le tout est très maniable et on enchaîne finalement les parties combat avec une aisance des plus plaisantes. Bien sûr, n’espérez pas terminer la dizaine de chapitres du scénario sans mourir, voire même… sans perdre TOUT VOTRE ÉQUIPEMENT ! Oui car, comme dans tout bon rogue-like qui se respecte, non seulement les étages que vous parcourez à l’intérieur des donjons sont aléatoires, mais vous perdrez également tout le contenu de votre inventaire en cas de défaite avant la fin du donjon. S’enchaîneront alors de looooongues heures d’errance à refaire inlassablement les mêmes donjons (bien que différents puisque générés aléatoirement, mais vous m’avez compris j’en suis certain). Je compatis à votre douleur, soyez sans crainte !
Et puis, il est à noter que, contrairement à son aîné là encore, The Awakened Fate Ultimatum est beaucoup… beaucoup… beaucoup plus bavard. Ce qui n’était pas gagné d’avance tant le premier opus était parfois très (voire trop) généreux en textes. On a parfois l’impression ici de jouer à un visual novel. Parfois intéressant, parfois un brin soporifique, le jeu se montre souvent beaucoup trop mou / lent. Il m’est arrivé lors de certains chapitres d’attendre (ou de lire, si vous préférez) pendant plus de 40 minutes les scénettes qui défilaient devant moi avant de pouvoir continuer le gros de l’histoire (ou en tout cas la partie donjons). C’est d’ailleurs à ce moment précis que je me suis rendu compte à quel point je faisais fausse route.
En effet, je croyais depuis le début du jeu que le gros de ce dernier se situait dans la partie combats / donjons / équipements / compétences / upgrades. J’ai fini par comprendre que The Awakened Fate Ultimatum avait un atout de taille faisant presque passer tout le reste pour de la figuration : un scénario exaltant ! Bien que similaire à l’opus de 2013, TAFU (oui je raccourcis le nom du jeu à ma convenance, messieurs dames !) a l’originalité de nous imposer des choix moraux tout au long de l’aventure (changeant donc la suite et la fin dudit jeu, selon les choix effectués par le joueur), ainsi que des scénettes pour le moins captivantes. Je vous le disais, la langue française n’est ici présente ni à l’oral ni à l’écrit, mais pour peu que vous soyez à l’aise avec l’anglais, je vous garantis que vous passerez un super moment devant ce melting-pot de conversations toutes plus improbables les unes que les autres. Moi qui m’attendais à faire passer le synopsis du titre au second plan lors de ma session de test, je dois avouer avoir été très agréablement surpris.
Bénéficiant d’un capital sympathie tout simplement gigantesque, The Awakened Fate Ultimatum est selon moi une très bonne surprise. Proposant un gameplay plus accessible et au final moins tactique que son prédécesseur, il saura trouver son public parmi (sans doute) les joueurs les moins habitués aux jeux de niche que sont Disgaea et compagnie. Une accessibilité somme toute flagrante qui va jusqu’à investir l’aspect visuel du titre, là encore peut-être un brin aseptisé pour l’occasion. Des couleurs plus vives, des personnages plus mignons, et une difficulté revue à la baisse, voilà les ingrédients miracles qui attireront peut-être ainsi les nouveaux venus. J’ai pour ma part passé un très agréable moment sur ce jeu, sur lequel, j’en suis certain, vous passerez vous aussi de trèèèèèès nombreuses heures. Ne vous laissez d’ailleurs pas avoir par le côté accessible du soft, vous risqueriez de tomber de haut. Bénéficiant, en outre, d’une bande sonore discrète mais très agréable, nul doute que les anglophones devraient lui laisser sa chance. L’un des derniers dungeon-RPG incontournables à sortir sur PlayStation 3. Ne le ratez pas !