Les frères Wachowski, ça vous dit quelque chose ? Si vous êtes fan de cinéma, il y a fort à parier que oui. Pourtant, si la hype qui entourait leurs films était intacte il y a encore une quinzaine d’années, ce n’est plus vraiment le cas aujourd’hui. Pas sûr, pourtant, que Jupiter Ascending, leur nouveau bébé, arrange les choses. Je précise que j’attendais ce film avec impatience depuis les premiers trailers estivaux. Tentative d’explications à travers ce billet.

En l’an de grâce 1999 sortait Matrix. Un Keanu Reeves au top de sa forme, une ambiance sombre amenant à la réflexion, sans oublier des effets visuels (dont le fameux Bullet Time) à couper le souffle. En clair, l’entreprise Wachowski était née. Pourtant, suite à cette trilogie dont seul le premier volet était réussi, les années de vache maigre pointèrent le bout de leur nez pour les deux frangins, réalisant à peine deux films en 9 ans. Speed Racer (en 2008) fut un échec total, tandis que Cloud Atlas (en 2012), sans être à jeter, mettait le doigt sur ce qui semblait être dorénavant une évidence : les Wachowski, c’est plus ce que c’était. Force est de constater que le changement de sexe de Larry (désormais Lana) illustre parfaitement ma phrase précédente.
Mais puisqu’on est ici pour parler de leur nouveau projet, faisons-le. Jupiter Ascending est donc un long-métrage de 2h07 durant lequel vous apprendrez à faire la connaissance de Jupiter Jones (interprétée par Mila Kunis), fille d’un scientifique russe et officiant en tant que femme de ménage dans un hôtel de Chicago. Rien d’extraordinaire, me direz-vous. En effet, mais c’était sans compter sur sa rencontre avec Caine (joué par Channing Tatum). Monsieur Muscles va en effet lui apprendre qu’elle est en réalité promise à un fabuleux destin (non, je ne le dirai pas), sans oublier que lui-même est un homme génétiquement modifié (José Bové, si tu nous lis…), et que, bien évidemment, elle court un graaaaave danger.

Vous l’aurez compris, le scénario en lui-même est loin d’être original. A vrai dire, ce qui m’a sauté aux yeux durant tout le film, ce sont justement toutes ces petites ressemblances avec Le Cinquième Élément (de Luc Besson, 1997). Car si Jupiter est une Leeloo, on peut clairement identifier Caine comme étant un Korben. Pire encore, Balem (interprété par Eddie Redmayne) est le Zorg de Jean-Paul Gaultier par excellence. Si je vous dis que même ses hommes lézards ressemblent à s’y méprendre aux extra-terrestres fans de flingues qu’on a connu à l’époque… Sidérant ! Enfin, qu’importe. Une fois que l’on s’est fait au plagiat à cet hommage au chef-d’oeuvre français, force est de constater que visuellement, le film est superbe. Des effets spéciaux en veux-tu en voilà, des batailles spatiales d’une intensité rare… La rétine s’en voit flattée. Avec un budget de 175 000 000 $, me direz-vous, le contraire eut été étonnant.
Malheureusement, c’est bien tout ce que le film a à offrir. Comprenez par là que si le synopsis n’a rien d’engageant, c’est surtout le côté faussement complexe de l’histoire qui calmera les ardeurs du spectateur lambda. C’est bien simple, le long-métrage est tellement mal monté que la quasi-totalité des choses évoquées ne se trouvent JAMAIS expliquées. Ni au début, ni au milieu, ni à la fin du film. Jupiter Ascending n’est qu’un enchaînement de scènes qui n’ont parfois aucun lien entre elles, donnant ainsi au spectateur la sensation d’être plongé au coeur d’une intrigue à plusieurs lectures. Et pourtant…
Si j’ai évoqué le montage du film, c’est qu’il m’a paru primordial de le faire. En effet, bien que les 2h07 nécessaires au visionnage soient d’une longueur sans nom, on ne pourra s’empêcher de pester contre les cases vides pour le moins énervantes que propose ce film. Je m’explique. On vous présentera tel ou tel personnage de sorte à ce qu’on le pense important pour l’intrigue. Résultat, celui-ci disparaît du projet quelques minutes après sans jamais réapparaître (ni même mourir). On vous montrera à quel point l’un des autres persos (principaux, semble-t-il) est méchant et était prêt à tout pour réduire l’humanité toute entière en cendres. Résultat, on apprendra quelques minutes plus tard qu’on l’a retrouvé et qu’il sera, je cite : « puni » (au coin avec un bonnet d’âne, c’est ça ?). Suite à ça, on passe complètement à autre chose et on ne l’évoquera plus jamais… Pour finir, un autre protagoniste est censé être malade (souffrant, mourant, ce que vous voulez…). Pourtant, sans que l’on sache pourquoi, ce dernier va mieux en plein milieu du film. Comme si les scènes coupées s’étaient enchaînées… Troublante, cette mise en scène !

Ai-je eu le temps de vous parler du côté romantico-ridiculo-ado-pas-rigolo ? Soit, allons-y ! Oui car si d’ordinaire les films de science-fiction sauce space opera sont plus connus pour leurs scènes d’action que pour leurs intrigues (Star Wars et Star Trek en sont de très bons exemples), Jupiter Ascending, lui, mise sur tout autre chose. Un aspect qu’on espérait bien mort et enterré depuis des lustres… Mais c’était sans compter sur les frères (!) Wachowski. Et si vous n’avez toujours pas deviné de quoi je parle, ne vous inquiétez pas, je vous le donne en mille. Jupiter Jones, en plus d’être incroyablement potiche (pas sûr que ce soit volontaire), agit comme une adolescente en mal d’amour chaque fois qu’elle croise Caine (Channing Tatum, donc). A base de stupidités du genre je-vous-connais-pas-du-tout-ça-fait-pas-plus-de-4-minutes-de-film-que-je-vous-ai-rencontré-mais-j’ai-bien-envie-de-vous-rouler-une-pelle-parce-que-je-suis-une-femme-qui-sait-ce-qu’elle-veut. Et ceci à 3 ou 4 reprises minimum.
Le calvaire aurait pu s’arrêter là si 2 des plus gros défauts du film n’avaient pas existé. Certes, ce ne sont pas des tares que l’on peut réellement reprocher au film en lui-même. Mais je me devais de vous en parler, afin que vous vous organisiez en conséquence. En effet, si les musiques du film, composées par Michael Giacchino sont plutôt bonnes, je ne peux malheureusement pas vous parler de la VO. Bizarrement, Jupiter : Le Destin de l’Univers (!) est l’un des seuls films du moment à être proposé en VF dans mon cinéma (qui diffuse quasiment tout en VOSTFR). Autant dire que la pilule a encore plus de mal à passer. Car si la voix française affiliée à Mila Kunis est loin d’être dégueu, ce n’est malheureusement pas le cas de tout le monde.

Celle que l’on a donné à Caine est tout juste potable (de toute façon, à raison de 10 phrases en 2 heures, l’un dans l’autre…). Mais alors si vous avez la malchance de tomber tout comme moi sur la VF, vous vomirez obligatoirement par les oreilles en entendant l’une des premières scènes du film. La première intervention de Balem, précisément. Le personnage en question est interprété vocalement par Donald Reignoux. Excellent habituellement à travers l’acteur Jesse Eisenberg (Bienvenue à Zombieland, 30 Minutes Maximum, The Social Network…), il est ici tout simplement exécrable ! Pour quelle raison, me direz-vous ? Principalement parce que Balem est souffrant (comme précisé plus haut) et parle donc comme quelqu’un qui n’a pas une santé de fer… Certes, c’est important de le faire remarquer, mais pas à ce point-là ! On se retrouve à rire de lui alors que ses lignes de dialogues ne sont pas supposées être drôles. Nos oreilles n’ont pas le même sens de l’humour, elles. Et puisqu’on en est à parler d’humour, laissez-moi ouvrir une petite parenthèse à ce propos avant de terminer par le dernier défaut de cette séance.

Car en plus de nous imposer un côté teenager très malvenu, Jupiter Ascending tente de se la jouer Gardiens de la Galaxie en disséminant quelques piques humoristiques de-ci de-là. Loupé ! Les quelques vannes qu’on trouve dans ce film sont tellement mauvaises et lourdingues que pas un seul spectateur n’esquissera un rictus à leur passage. On en viendrait même à penser que Cyril Hanouna, Dieudonné et Jean Roucas ont participé à l’écriture du script (qui fait, soi-dit en passant, environ 600 pages !)… Parenthèse fermée.
Je vous le disais plus haut, un point reste à être traité. Ce sera rapide tant j’ai peu de choses à dire sur le sujet mais je tenais tout de même à vous avertir : n’allez surtout pas voir ce film ! N’allez surtout pas voir ce film en 3D ! Elle n’apporte strictement rien et, pire que tout, ne met aucun effet, aucune scène, aucun objet en valeur. L’effet de profondeur est de l’ordre du néant total. Voilà qui résume bien mon ressenti sur ce point, n’est-il pas ?

Vous l’aurez compris, Jupiter Ascending, en dépit d’une qualité visuelle (en 2D) irréprochable et d’une bande-son (hors doublages) qui tient la route, ne plaira qu’aux amateurs de films pop-corn. Aussitôt vu, aussitôt oublié. Ultra-léger dans son approche scénaristique, le film est au contraire très lourd à digérer. Des cuts bien trop nombreux et un aspect « film pas marrant pour ados à deux doigts de basculer dans la romance crétine » en font une déception de tous les instants. Si le regard troublant de Mila Kunis n’a rien perdu de sa superbe, que dire en revanche du talent des Wachowski ? Véritable prouesse technique à lui tout seul, le nouveau long-métrage SF de 2015 au budget pharamineux n’en reste pas moins mou du genou, peu intéressant, et rempli d’incohérences toutes plus grosses les unes que les autres. La balle est dans votre camp.
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