Lancée en 1994 sur Neo-Geo et sur bornes d’arcade, la saga The King of Fighters (KoF pour les intimes) porte assez bien son nom. En effet, cette licence du studio SNK n’est autre qu’un immense cross-over réunissant tous les plus grands combattants trouvables habituellement dans les autres séries phares de l’éditeur (Fatal Fury, Art of Fighting…). 22 années plus tard, et 5 ans après un King of Fighters XIII de très bonne facture sur PC, PS3 et Xbox 360, voici venir sa suite, très logiquement baptisée King of Fighters XIV, et exclusive cette fois à la PlayStation 4.
Vous le savez sûrement, se faire une place de choix parmi les cadors du jeu de combat n’est pas chose aisée. Beaucoup de joueurs actuels, compétitifs ou non d’ailleurs, ne se défient plus que sur le célèbre Street Fighter. Pourtant, force est de constater qu’il y a belle lurette que cette licence jadis idolâtrée n’a plus grand chose à apporter à la discipline. Après un Street Fighter IV en demi-teinte sorti en 2009, Capcom n’a tout simplement plus jamais su / pu reconquérir le cœur des fans de la première heure. Pire, l’éditeur commença alors à creuser encore un peu plus sa propre tombe en vendant des itérations toutes plus dispensables les unes que les autres (Super Street Fighter IV en 2010, Super Street Fighter IV : Arcade Edition en 2011, puis Ultra Street Fighter IV en 2014). Il n’en fallait pas plus pour provoquer la grogne des joueurs du monde entier. Une colère qui ne s’estompa finalement pas en 2016, contrairement à ce que Capcom aurait pu pensé. La faute à un Street Fighter V (exclusif à la PlayStation 4 et au PC) au contenu ridiculement vide, aux graphismes d’un autre âge, et au système économique extrêmement douteux…
Il n’en fallait pas plus pour convaincre les férus de VS Fighting d’aller vérifier par eux-mêmes si l’herbe n’était finalement pas plus verte ailleurs. Guilty Gear, Blazblue, Skullgirls, nombreux sont les prétendants au titre d’outsider. Bien sûr, si vous êtes tentés par le monde des jeux de combat mais que vous préférez les titres bien funs plutôt que techniques, je ne saurais que trop vous conseiller de vous diriger davantage vers Mortal Kombat X ou encore Injustice 2 (qui s’annonce tout aussi épique que son grand frère). Mais si c’est réellement la compétition qui vous anime, si vous aimez jouer un seul personnage pendant des mois pour le maîtriser de bout en bout, alors c’est effectivement un jeu de VS Fighting japonais qu’il vous faut.
L’illustre Virtua Fighter n’a plus montré signe de vie depuis la génération PS3 / Xbox 360, Soul Calibur et Dead or Alive se sont perdus en route, et le déjà culte Tekken 7 n’arrivera pas sur nos consoles avant plusieurs mois. Bien sûr, Dragon Ball Xenoverse 2 compte bien débarquer dans quelques semaines, mais il ne s’adresse clairement pas à la même catégorie de joueurs. Autant dire que ce King of Fighters XIV arrive à point nommé. Arrivera-t-il pour autant à prendre suffisamment d’avance sur ses concurrents directs ?
Pour commencer, il faut bien le dire, c’est avant tout le roster de ce nouveau KoF qui fait rêver. Avec 50 personnages jouables, il y a forcément de quoi s’éclater (au sens propre comme au figuré), et surtout de quoi varier les plaisirs. Aux côtés des classiques Goro ou encore Kyo (rien à voir avec le groupe pop-rock des années 2000, rassurez-vous!), on trouvera donc pas moins de 19 nouvelles têtes. Luong, Kukri, ou encore King of Dinosaurs (ce dernier vous fera forcément penser à King, issu de la licence Tekken), tous ne sont pas forcément inoubliables, ni même intéressants à jouer, mais force est de constater que le choix est gargantuesque et que les sessions à plusieurs (notamment offline) s’enchaîneront sans déplaisir. On notera d’ailleurs au rang des points noirs, pour ceux qui se verraient déjà arpenter le sinueux chemin de la gloire en ligne, que le netcode était loin d’être parfait lors de l’écriture de ce test (basé sur une version éditeur identique à la version vendue en magasin, fournie par le distributeur du jeu en France, j’ai nommé Koch Media). À voir, donc, si SNK prévoit des patchs à l’avenir, ce qui ne fera, de toute évidence, pas de mal à ce jeu si attendu.
Pour terminer sur la partie Online, sachez que l’on peut y entrer à 6 joueurs maximum. Un bon point, donc, d’autant que ce pan du jeu comprend, en plus des matchs classés et des matchs amicaux, un mode Entraînement en ligne (toujours pratique pour les plus perfectionnistes), un mode Spectateur des plus plaisants, ainsi que la possibilité de créer et / ou de visionner des replays de combats online. De quoi passer des heures à analyser la moindre frame, et pourquoi pas s’inspirer, des meilleurs tacticiens.
Toujours est-il que je tiens à être honnête avec mon lectorat ; bien qu’ayant passé de très bons moments sur ce King of Fighters XIV, j’ai tout de même été déçu par le contenu global du jeu. Pas par son roster, vous l’aurez compris, car j’ai tout simplement adoré passer d’un perso à un autre (et notamment dans le mode 3 VS 3, jouissif et très dynamique). Non, c’est clairement le manque de modes de jeu qui se fait ressentir au bout de quelques heures à peine. Car si, tout comme moi, le Online ne vous passionne pas, autant dire que vous risquez fortement de rester sur votre faim. Paradoxalement, j’ai trouvé le mode Histoire vraiment grisant, et très fun. Dans celui-ci, on enchaîne les affrontements après avoir choisi son trio de tête. Le scénario, bien que très cliché et très cul-cul la praline, se laisse parcourir assez facilement. D’ailleurs, contrairement à bon nombre de jeux de combat japonais, on a ici droit à de vraies cut-scenes façon manga / animé, et le rendu fait vraiment plaisir à voir (idem en ce qui concerne le doublage). Pour autant, je dois bien avouer que sur le long terme je me suis fortement ennuyé dans ce mode Scénario, moi qui en espérait tant (trop, sans doute).
La durée de vie du soft dépendra donc de vous, et de votre attrait pour ce que l’on pourrait qualifier de « nombreux modes secondaires ». En effet, outre les combats en ligne, le mode Histoire, et les combats dits classiques en 1 VS 1 et 3 VS 3, King of Fighters XIV comprend un mode Tutoriel, un mode Entraînement, mais aussi un mode Mission. Pas forcément captivant, ce dernier a le mérite de proposer 3 sous-segments : Survie, Contre-la-Montre, et Défis. J’ai pour ma part trouvé ces ajouts très dispensables, et surtout, pas amusants pour deux sous. Comprenez-moi bien, le mode Défis, par exemple, ne vous propose finalement que d’enchaîner les combos qui défilent à l’écran… Avouez qu’ils ont une drôle de façon de définir la notion de « défis » chez SNK. C’est clairement le genre de mode qui nous fait amèrement regretter le Tekken Force et le Tekken Bowl, pour ne citer qu’eux… C’est donc du côté du gameplay qu’il faudra regarder avant de jeter la pierre à ce très sympathique nouveau-venu dans la famille KoF. Car si les modes de jeu, vous l’aurez compris, n’ont rien de bien folichons, il se pourrait bien que vous soyez happé par une profondeur, dans les mécaniques de jeu, que l’on voit rarement ailleurs.
Il me serait bien difficile de tout vous expliquer, voire de tout vous résumer, par le biais de ce test, tant l’illustration de mes propos serait plus aisée en vidéo. Je serai donc bref : j’ai pour ma part trouvé ce King of Fighters XIV très technique, et en même temps incroyablement accessible. Bien évidemment, n’espérez même pas vous jeter dans l’arène (offline ou online) sans être passé par la case Tutoriel. Celui-ci, très bien fait et très progressif, ne manquera pas de vous montrer à quel point il vous faudra cravacher pour arriver à dompter (ou tout du moins essayer) les mécanismes made in SNK. Le mode MAX, pour ne citer que lui, a été fortement amélioré. Bien sûr, les habitués de la licence ne seront sans doute pas tellement dépaysés, mais il faut bien le dire, cette feature est toujours aussi jouissive. Pour résumer, tout comme dans de nombreux autres jeux de Versus Fighting, le mode MAX est une jauge située en bas de votre écran, à remplir et à activer au bon moment afin d’effectuer des Super EX (rien à voir avec Uma Thurman, je vous le promets). Le tout dans un enchaînement d’effets visuels plutôt badass, il faut bien le dire.
Jouer à King of Fighters XIV est plaisant, le tout est vif, exigeant mais aussi incroyablement accessible pour peu que l’on y accorde de son temps. La marge de progression est réelle, et c’est au bout de plusieurs dizaines d’heures d’entraînement / d’acharnement que l’on commencera à prendre réellement plaisir à tataner tout ce qui bouge. Les Climax Cancels, par exemple, nouvelles formes d’annulation d’enchaînement à asséner à l’adversaire, font la part belle au beau jeu. Regarder des matchs (notamment via le mode Replay de la partie Online dont je vous parlais plus haut) n’a jamais été aussi plaisant. On apprend, encore et toujours, on tente de comprendre, voire de reproduire les gestes qu’il faut, où il faut, quand il faut… Un gage de qualité certain, donc, pour quiconque rêverait d’un jeu de combat fun mais aussi tout ce qu’il y a de plus technique, afin de passer la rentrée, et pourquoi pas l’hiver entier, à tenter de tirer un maximum de chacun des 50 persos du jeu.
On notera enfin un aspect graphique général très agréable à l’oeil, et le mélange 2D / 3D semblait tout indiqué dans ce King of Fighters XIV. Pour autant, et même si les 19 arènes sont très réussies en terme d’ambiance, on aurait pu espérer un petit brin de folie non négligeable, que ce soit concernant les arrière-plans, ou plus globalement en ce qui concerne le character design. Loin d’être affreux, certains protagonistes auraient tout de même, je pense, mérité un soin plus prononcé. Reste que le jeu tourne à 60 images / seconde constamment et que le dynamisme inhérent aux affrontements du jeu en est décuplé. Un très bon point, donc ! Pour finir, il est également utile de rappeler que tous les sticks arcade issus de la PlayStation 3 sont compatibles avec le jeu. De quoi redonner le sourire aux plus pessimistes qui commençaient à désespérer ! On retiendra donc de ce nouveau King of Fighters XIV sa jouabilité plaisante du début à la fin, son roster absolument fou, ainsi qu’un aspect technique des plus réussis. Hélas, ses modes de jeu peu inspirés, son segment Online perfectible, et son austérité ambiante pourront en rebuter plus d’un. La savate est dans votre camp !