1997. Lady Di et le commandant Cousteau décédaient. Jacques Chirac dissolvait l’Assemblée Nationale. Le Cinquième Élément et Titanic sortaient au cinéma… Mais 1997 c’est aussi l’année de naissance de Chloë Grace Moretz, l’actrice principale de Si je reste.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que pour une jeune fille de 17 ans, mademoiselle a déjà une filmographie bien remplie. A son compteur, on trouve en effet des films comme Kick-Ass (aux côtés de Nicolas Cage) ou encore Dark Shadows (histoire de côtoyer Tim Burton, sa femme Helena Bonham Carter, et bien sûr Johnny Depp). C’est pourtant un rôle très différent que la demoiselle tient dans Si je reste. Ce dernier est le premier long-métrage de monsieur R.J. Cutler, d’ordinaire plutôt habitué aux séries (Nashville, The Ordained…), et est une adaptation du roman du même nom, écrit par Gayle Forman.
Si je reste nous conte l’histoire de Mia, une adolescente un peu renfermée, et de son nouveau chéri Adam (Jamie Blackley, aperçu notamment dans Blanche-Neige et le Chasseur). Tout va plus ou moins pour le mieux dans le meilleur des mondes jusqu’à ce que Mia soit victime d’un accident de voiture la plongeant dans le coma. Fatalement, son quotidien devient moins drôle, vous en conviendrez. Suite à cela, le film oscillera entre deux phases bien distinctes tout au long des 106 minutes nécessaires à son visionnage. En effet, on passera régulièrement des scènes « actuelles« , à savoir post-traumatiques, à des scènes antérieures à l’accident. N’ayant pas lu le livre dont est inspiré le film, je ne saurais vous dire comment se déroulent ces ellipses temporelles au format papier. Cela dit, force est de constater que le procédé, à défaut d’être nouveau, a tout pour plaire aux spectateurs.
La mise en scène est donc suffisamment astucieuse pour briser la monotonie qui sied la plupart du temps à ce genre de films pour jeunes adultes. Mais est-ce suffisant pour nous tenir en haleine ? Est-ce un énième long-métrage sauce Twilight (le côté fantastique en moins, quoique…) mêlant drame et roulages de pelles intensifs ? Oui et non. En effet, force est de constater que l’ensemble a tout du film cliché pour ados ayant les hormones qui les démangent. Pourtant, sans pouvoir vous expliquer pourquoi, j’ai été complètement happé par l’intrigue du projet (et sachez que je ne suis plus un ado depuis moult années, quant à mes hormones, aucune démangeaison à signaler, je vous remercie), au point de trouver les 20 dernières minutes soûlantes à souhait (comprenez-moi bien, on aimerait en voir le bout, passé un certain temps).
Tout comme pour Enemy dont je vous parlais il y a quelques jours, je ne peux malheureusement pas m’attarder plus que ça sur le scénario sous peine de spoils involontaires. Je tiens à préciser en revanche que si je suis allé voir ce film, c’est tout simplement que le trailer m’avait attiré. Malheureusement, celui-ci étant en anglais, j’ai été forcément déçu de ne pouvoir voir le film qu’en VF (salle oblige). Une version française de bonne facture, certes, mais j’aurais tout de même voulu apprécier le « réel » talent d’actrice de Chloë Grace Moretz, d’autant qu’elle m’avait fortement déplu dans Dark Shadows (film dans lequel elle était tout autant dévêtue que dans Si je reste, d’ailleurs). Le seul doublage a avoir été complètement loupé est celui de la mère de Mia, jouée à l’écran par Mireille Enos (Gangster Squad). Fort heureusement, les chansons interprétées tout au long du film sont bel et bien en VO. Les chansons, vous dites ? Oh, veuillez m’excuser, il me semblait vous en avoir parlé.
Oui car dans Si je reste, l’un des aspects les plus intéressants mis en avant est musical. Mia y est une violoncelliste de talent, tandis qu’Adam, son petit copain, est chanteur dans un groupe de rock local. Pour l’anecdote, l’action du film se déroule à Portland, tandis que dans la réalité le tournage s’est effectué uniquement au Canada (comme dans Enemy, mais sans les filtres jaunes nauséeux). Toujours est-il que musicalement, l’ensemble est très plaisant à écouter, même si, VF oblige (enfin, j’ose imaginer que c’est dû à cela), le mixage audio manque clairement de basses et, d’une manière générale, de profondeur. Dommage quand on sait qu’on y parle des Ramones, d’Alice Cooper ou encore d’Iggy Pop.
Alors doit-on ranger Si je reste dans la case « film aseptisé pour jeunes fougueux en mal d’amour » ? Clairement non. L’oeuvre de R.J. Cutler a bien plus à proposer. Émouvant, parfois drôle, le film est surtout poignant. Poignant car il met le doigt sur des sujets pas toujours évidents à évoquer. La séparation, la mort, les choix de vie, la marginalisation. Certes, on est ici bien loin d’une étude psychologique sur les comportements humains en phase terminale, mais au-delà de son apparence « téléfilm« , qui pourra déplaire, j’en conviens, Si je reste nous amène à nous poser des questions sur nous-même, et pourquoi pas sur les rapports que l’on peut entretenir avec nos proches. Mention spéciale, d’ailleurs, pour Stacy Keach, qui incarne ici le grand-père de Mia d’une manière tout à fait magistrale.
Parfois simpliste dans son approche, pas toujours pertinent, le premier film de R.J. Cutler reste une bonne pioche. A deux doigts de basculer dans le film familial classique, Si je reste est pourtant loin de convenir à tous les publics. Plus profond qu’il n’y paraît, son thème principal, d’apparence banale, n’en reste pas moins sombre pour autant. Amateurs de films poignants dont l’intrigue est à elle seule un pied-de-nez aux longs-métrages prises de tête habituels, n’hésitez plus. Le montage de Si je reste vaut le coup d’oeil, tandis que vos oreilles ne seront pas en reste, et ce, que vous soyez The Clash, ou même Beethoven. Mouchoirs conseillés.